Abattages d’arbres: la guerre des chiffres reprend

Plus de 4600 unités abattues ou sur le point de l’être dans le canton depuis le début de l’année, selon le site PilierPublic.com. La plateforme constate une augmentation des cadences de coupes, ce que réfute vertement l’Etat.

  • Après une légère baisse en 2020 due à la pandémie, les abattages sont repartis à la hausse. 123RF

    Après une légère baisse en 2020 due à la pandémie, les abattages sont repartis à la hausse. 123RF

«Je suis en colère, c’est une véritable hécatombe. A chaque chantier, les porteurs de projets font trop souvent table rase de tous les arbres existants plutôt que de réfléchir à ce qu’on peut préserver», dénonce avec force Margareth Robert-Tissot, présidente de l’Association pour la sauvegarde de Confignon et de Sauvons les Evaux. En cause, les dernières données recueillies par PilierPublic.com concernant l’abattage d’arbres à Genève. Et le constat est sans appel: depuis janvier, 4643 arbres auraient été coupés ou seraient en passe de l’être dans le canton, un chiffre en augmentation par rapport à la même période il y a deux ans (+1%). La Ville de Genève est d’ailleurs le plus mauvais élève (+10%).

Boom de la construction

La pandémie a-t-elle eu un impact sur les abattages? «Il ne s’agit pas d’un rattrapage des constructions après la crise Covid, car seule une légère baisse des enquêtes publiques (-5%) a été constatée en 2020», répond Guilhem Tardy, responsable du site. Pour lui, l’augmentation des abattages traduit un véritable boom de la construction, en témoigne le nombre d’enquêtes publiques ouvertes depuis le début de l’année (+68%). «C’est consternant, commente Margareth Robert-Tissot, les arbres qu’on replante après sont des avortons qui mettront des années pour grandir ou pas, selon leur emplacement.» L’association qu’elle préside portera ses revendications lors d’une manifestation prévue samedi 6 novembre au centre-ville de Genève.

Pour arriver à ces résultats, la plateforme surveille quotidiennement les avis officiels depuis 2016. Un algorithme est chargé d’analyser les données. Accusé par les autorités de manquer de fiabilité, PilierPublic.com défend la qualité de son travail. «Depuis deux ans, chaque avis d’abattage précise le nombre d’arbres pour chaque essence. Les chiffres que nous publions sont donc exacts et il ne peut plus y avoir de débat sur ce point», estime Guilhem Tardy. Et d’ajouter:«les plus grands propriétaires fonciers et les entreprises apprécient la fiabilité de notre service».

De 5500 à 7000 arbres abattus

«La plateforme PilierPublic a sa propre méthodologie», estime Aline Bohlen, chargée de communication pour le Département du territoire (DT). Le Canton refuse de se prononcer sur des chiffres qu’il n’a pas validés. Il rappelle toutefois que la Cour des comptes a admis que les abattages annuels cantonaux sont de l’ordre de 5500 à 7000 unités: «Le chiffre de 4643 arbres que vous avancez semble donc indiquer plutôt une fourchette basse, même si l’année n’est pas finie. Dans tous les cas, il n’y a pas eu plus de constructions en 2021 qu’en 2019.» Le DT rappelle par ailleurs qu’il ambitionne de planter 150’000 arbres en dix ans, dans le cadre du plan d’arborisation cantonal.

Du côté de la Ville de Genève, on se montre plus critique sur la situation actuelle. «Je pense qu’il y a une marge d’amélioration et qu’un vrai changement de mentalité doit s’opérer», déclare le conseiller administratif Alfonso Gomez. Pour l’élu écologiste chargé de l’Environnement, Genève manque d’arbres, notamment au regard du contexte climatique et des coupes d'arbres nécessaires après les intempéries. Optimiste, il rappelle qu’il a demandé au Service des espaces verts que, pour chaque arbre abattu, trois espèces comparables soient replantées. «Cela portera le nombre d’arbres plantés la saison prochaine à 900, contre une moyenne de 150 à 200 lors de la précédente législature.»