Thierry Apothéloz tend un micro aux 92’000 seniors genevois

Le ministre de la cohésion sociale veut mettre les aînés du canton aux commandes des décisions qui les impactent. Interview.

"Ce n’est parce que l’on est à la retraite que l’on cesse toute activité"

D’ici à 2040, les personnes franchissant le cap de l’AVS représenteront un quart de la population et le nombre des 80 ans et plus, aura lui, doublé à Genève. Pour le conseiller d’Etat, chargé de la Cohésion sociale, il n’est pas question que le vieillissement de la population se mesure exclusivement à l’aune des coûts de la santé. Les seniors ont des idées et des besoins. C’est à la fois pour recueillir leur parole et pour amorcer une politique participative, qu’il lance le 
22 avril le Panel des seniors. Interview.

GHI: En quoi consiste cette opération?
Thierry Apothéloz: Nous allons adresser à toutes les personnes en âge AVS et domiciliées dans le canton une invitation à rejoindre le Panel des seniors et sa plateforme informatique afin de donner leur avis sur des thématiques liées à la qualité de vie, telles que les liens sociaux et familiaux, les loisirs et activités culturelles et sportives, la santé, le bénévolat, l’aide donnée ou reçue, la mobilité, le logement et la sécurité. Ce sondage porte sur une cinquantaine de questions et requiert une quinzaine de minutes.

Vous avez opté pour un questionnaire en ligne. La fracture numérique générationnelle n’est donc pas un problème?
Elle se résorbe de façon remarquable. S’il n’y a rien de surprenant à ce que les 65-69 ans soient à 95% connectés, il faut savoir que les 70-79 ans le sont à 85% et les 80-84 ans à 54%. C’est ce qu’atteste une étude réalisée par l’Université de Zurich et Pro Senectute. Les personnes qui connaissent des difficultés en informatique pourront trouver de l’aide auprès des associations dont elles sont membres, de leurs amis ou encore de leur famille. Nous effectuons en parallèle une grande campagne d'information auprès de l'ensemble du réseau de nos partenaires, qui va des institutions (communes, EMS, IEPA), aux associations (club d'aînés) en passant par les lieux où se rendent régulièrement les seniors (cabinets médicaux, pharmacies, offices de poste).

Comment est née l’idée de ce dispositif novateur dédié aux seniors?
A mon sens, la citoyenneté n’a pas d’âge. Ce n’est parce que l’on est à la retraite que l’on cesse toute activité. A cet égard, le terme de retraite me semble réellement inapproprié. Comme si les sexagénaires se retiraient du monde. La langue espagnole est plus prometteuse et parle de jubilacion. Les enjeux d'une société de la longue vie sont au cœur d’un livre que j’ai publié en 2023*. Enfin, depuis que je siège dans des Exécutifs (ndlr: il a été conseiller administratif de Vernier), je m’efforce de rapprocher la politique des citoyennes et des citoyens.

Les seniors sont souvent associés aux coûts de la santé?
Oui, c’est vrai, c’est injustement réducteur. On évoque fréquemment le besoin accru en soins impactant évidemment le financement des assurances sociales tandis que le nombre d’actifs fléchit. En vérité, le vieillissement de la population recouvre un spectre bien plus large. Il touche l’ensemble de l’action publique de la cohésion sociale, au logement en passant par la sécurité et la formation.

Cette part active de la population à la politique des seniors ne s’arrête pas à la seule collecte du 22 avril?
Non, les participants seront sollicités 3 ou 4 fois par an sur différents thèmes. En outre, cette base de contributeurs pourra être utilisée par d’autres départements intéressés à connaître l'avis des seniors. Je précise que l’inscription est anonyme et qu’il est possible de se désengager en tout temps. J’ai voulu par ailleurs une transparence totale sur la récolte, l’utilisation des données et les résultats. Ainsi, le panel sera régulièrement informé de l’avancement de cette démarche unique en Suisse.

Pour participer: www.seniors-ge.ch