Face à face: votations du 15 mai - modification de la loi sur la transplantation

  • Mauro Poggia. PHOTO STÉPHANE CHOLLET

  • Yves Nidegger. PHOTO DR

Recevoir c'est accepter de donner

Mauro Poggia, conseiller d'Etat (MCG)

OUI • La loi pour laquelle nous voterons est un compromis pertinent et raisonnable entre une situation actuelle, insatisfaisante, et l’initiative qui veut instaurer une présomption absolue de consentement au don d’organes.

Ainsi, dans le cas où la personne ne se sera pas exprimée expressément contre le don de ses organes, dans un document ou un registre créé dans ce but ou auprès de ses proches, on présumera qu’elle y est favorable. On interpellera les proches pour savoir si une volonté a été exprimée. Et si aucun proche n’est atteignable, on devra s’abstenir de tout prélèvement d’organe.

Les équipes qui doivent constater le décès et s’assurer de l’absence d’opposition exprimée auprès des proches n’ont aucun contact avec celles chargées d’opérer une transplantation. L’éthique médicale ne souffre ici d’aucun compromis, même s’il s’agit de sauver des vies.

Trop de personnes meurent faute d’avoir eu la chance de bénéficier d’un don d’organe. Accepter la mort d’un proche, parfois d’un enfant, qui aurait pu avoir une vie normale, faute de donneur? Ce choix, faisons-le et ne le reportons pas sur nos proches qui, souvent, sont sous le choc d’une séparation brutale! Faisons en sorte que notre mort trouve un sens!

La culture ou la religion ne sont pas ici des obstacles, mais des prétextes. On ne peut pas envisager de recevoir sans être prêt à donner.

 

Le consentement ne se présume pas

Yves Nidegger, conseiller national (UDC)

NON • Contrairement à ce qui est titré ces jours-ci, ce n’est pas du don d’organes dont il est question le 15 mai 2022. Mais du prélèvement d’organes en l’absence de don. Rien n’est plus beau que le don de soi mais qu’est-ce qu’un don sans consentement, sinon un viol? Seul un oui est un oui. Qui ne dit mot ne consent pas, cette règle du droit suisse s’applique à tous les contrats et devrait être plus scrupuleusement respectée encore lorsque la personne concernée n’est pas en mesure de se défendre. Et peu importe la cause, aussi bonne soit-elle.

Imaginez les réactions si l’on déclarait que le compte bancaire dont vous n’aurez plus l’usage après votre mort est présumé donné à ceux qui souffrent de la faim au risque d’en mourir. La cause serait à l’évidence excellente, l’impératif moral indiscutable et la disproportion manifeste entre l’intérêt immense des uns à survivre à la famine et l’inconvénient minuscule des héritiers à ne pas percevoir, en l’absence de testament contraire, une somme d’argent dont ils n’ont pas nécessairement besoin. Le projet serait balayé.

Ce qui est vrai d’une chose fongible, comme une somme d’argent, l’est plus encore des organes qui composent l’intimité de ce corps avec lequel une personne a cohabité toute sa vie. On se plaint à juste titre que trop peu de personnes soient donneuses; si ce texte passe, les refus explicites vont exploser.