La politique: notre grande affaire, à tous!

GRAND CONSEIL • Faire les lois. Contrôler l’activité du gouvernement. Telles seront, pendant cinq ans, les missions du Grand Conseil élu le 2 avril. Quant au seul patron, dans notre démocratie suisse, c’est le peuple.

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C’est fait, les élections sont derrière nous, du moins pour le Grand Conseil. Reste, pour le 30 avril, le second tour du Conseil d’Etat. La campagne législative, qui s’est achevée le dimanche 2 avril par l’élection de cent députés sur près de sept cents candidats, aura été interminable. Pour votre serviteur, elle avait déjà commencé début janvier, pour lancer la grande aventure des Visages de Campagne (ndlr: sur Léman Bleu). Une joute électorale trop longue, et un second tour encore plus long (quatre semaines), interrompu par les fêtes de Pâques. Il en résulte une machinerie lourdingue, qui ne sert pas l’image de la démocratie représentative. En cette veille de période de Fêtes, nous sommes tous sur les rotules.

Le peuple parle au peuple

Mais enfin, c’est fait. Pendant cinq ans, ce parlement aura deux missions: faire les lois, contrôler l’activité de l’exécutif et de l’administration. Si ses lois nous déplaisent, nous, le corps des citoyennes et citoyens, avons toute latitude de les retoquer, par le salutaire exercice du référendum. Le seul patron, dans notre démocratie suisse, c’est le peuple.

Tout le génie de notre pays, c’est de faire coexister, par un frottement permanent, la démocratie représentative et la démocratie directe. Je n’ai jamais, vous le savez, caché ma très vive préférence pour la seconde. Notamment pour le droit d’initiative populaire, qui ne se définit pas par rapport à une loi parlementaire, mais surgit du peuple, saisit le corps électoral d’une idée nouvelle. C’est le peuple qui parle au peuple, en jouant à saute-mouton par-dessus les tranquillités parlementaires.

Consanguinité et entre-soi

Car le drame du parlement genevois, sa maladie héréditaire, qui revient toutes les législatures, après un état de grâce de quelques mois, ce ne sont pas ses dissensions (il est là pour les poser!), mais au contraire ce mélange de consanguinité et d’entre-soi, ce goût pour la barbichette, ces non-dits autour de petits services rendus, qui l’assimilent davantage à un club anglais, fauteuils de cuirs et chuchotements maltés, qu’à une arène où les fronts s’entrechoquent. Le tutoiement généralisé, que je n’ai jamais compris, en est l’un des signes liturgiques. Car ils ont aussi leur latin de messe, avec insupportables béquilles de langage («Vous transmettrez, Monsieur le Président»), sabir technique et juridique: on veut bien montrer, par l’usage des mots, qu’on est entre soi, entre initiés.

Je terminerai en confessant un paradoxe: pris un par un, chaque humain est attachant, j’ai été saisi (une fois de plus) par ce sentiment dans mes face-à-face. Mais, dès qu’ils deviennent groupe, il y a meute, chefs de clans, jeux de pouvoir, et c’est là que tout se dégrade. Et c’est là que je retrouve ma très vieille tentation antiparlementaire. Et c’est là que j’invite mes concitoyennes et concitoyens, tous ensemble, à faire la politique. Les élus sont là pour faire des lois. Mais la politique ne leur appartient pas. Elle est notre grande affaire, à nous tous. Lire aussi en page 3.