«Cet hiver, je dormirai dans ma voiture»

PRÉCARITÉ • A l’approche du froid, Nathalie* lance un cri d’alarme. Elle travaille à 100%, mais aucune régie ne lui donne la possibilité de se loger. Une seule solution, passer ses nuits dans sa voiture avec ses deux chiens.

  • La situation de Nathalie, 56 ans, est encore plus préoccupante avec l’arrivée de l’hiver. DR

    La situation de Nathalie, 56 ans, est encore plus préoccupante avec l’arrivée de l’hiver. DR

  • La situation de Nathalie, 56 ans, est encore plus préoccupante avec l’arrivée de l’hiver. DR

    La situation de Nathalie, 56 ans, est encore plus préoccupante avec l’arrivée de l’hiver. DR

Nathalie* n’a ni aigreur ni haine. Peut-être seulement quelques regrets d’avoir fait confiance à certaines personnes malhonnêtes. «A deux reprises, j’ai travaillé pour des sociétés qui ne m’ont pas versé mon salaire, précise cette femme de 56 ans. Je n’avais pas d’économies, la situation est très rapidement devenue compliquée. C’était l’automne dernier, j’ai fait l’erreur de dire au propriétaire de mon appartement que je ne pouvais plus payer mon loyer. Par souci d’honnêteté, j’ai remis le bail.» A ce moment-là, la machine infernale se met en marche. Cette habitante du Grand Genève n’a d’autres choix que de dormir dans une forêt avec ses deux chiens. En se lavant tant bien que mal dans une rivière. Et en multipliant les couches de vêtements pour survivre à la rudesse des nuits hivernales.

Vague de refus

Au printemps dernier, un membre de sa famille lui tend la main. Provisoirement: «Cette personne m’a hébergée quelques semaines, mais les gens en ont vite marre, même s’ils font partie du cercle familial. Ensuite, je suis allée chez une autre personne proche, mais rebelote, on m’a gentiment demandé de partir. Et pendant ce temps, je n’essuie que des refus de la part des régies.»

Pourtant, Nathalie travaille. Son emploi à plein-temps dans le secteur de la restauration lui permet de gagner 3000 francs par mois. Mais avec la pénurie immobilière qui touche la région, elle ne parvient pas à décrocher le fameux sésame: un petit appartement pour elle et ses chiens. Elle ajoute en pleurs: «Ces deux bêtes sont mes compagnons de vie. Sans eux, j’aurais déjà fait une bêtise.» Avant d’ajouter: «Ma voiture est mon deuxième pilier, je n’ai pas d’autres solutions pour l’instant.»

Urgence

Elle est depuis peu aidée dans ses démarches par Kim Grootscholten, fondatrice de l’ONG genevoise Toit pour tous. Qui précise: «Cette souffrance morale est d’une violence et d’une indécence ultimes dans notre pays riche. Je lance un appel pour qu’un logement puisse lui être proposé dans le canton de Genève ou celui de Vaud. On ne peut pas laisser dormir quelqu’un dans une voiture, c’est ignoble! Et Nathalie n’est pas un cas isolé, la Suisse compte plus de 5000 SDF . Il est urgent d’agir!»

* nom connu de la rédaction

Deux jours pour sensibiliser la population et les élus

Toit pour tous va lancer cette année la Journée internationale du sans-abri. Les 4 et 5 novembre prochains, l’ONG visera à sensibiliser et à mobiliser l’opinion ainsi que les pouvoirs publics à la situation des personnes en difficulté financière en Suisse. Selon les derniers chiffres publiés par l’Office fédéral de la statistique, 570’000 individus vivaient dans la précarité en 2015, soit 7% de la population. Ce taux est en hausse de 0,4%. Les femmes seules avec des enfants, les personnes peu qualifiées, les seniors et les étrangers en provenance de pays extra-européens, sont les plus touchés. En comparaison internationale, la Suisse fait cependant partie des bons élèves. Le taux de risque de pauvreté s’élève à 15,6%, légèrement en dessous de la moyenne de l’Union européenne (17,3%).