Patrons de bistrots menacés par des casseroles judiciaires

NOUVELLE LOI • Pincés pour conduite en état d’ivresse, certains patrons de restaurant craignent d’être contraints de fermer leur établissement. Les premières sanctions devraient tomber ce printemps.

  • Une épée de Damoclès plane sur certains restaurateurs. GETTY IMAGES/6OKEAN

    Une épée de Damoclès plane sur certains restaurateurs. GETTY IMAGES/6OKEAN

L’année 2016 était transitoire, 2017 sera celle des premières sanctions. La nouvelle loi sur la restauration, le débit de boissons, l’hébergement et le divertissement (LRDBHD), entrée en vigueur le 1er janvier de l’année dernière, empêche Antoine* de dormir. Ce restaurateur installé dans le quartier des Eaux-Vives craint de devoir fermer son établissement: «On m’a demandé un extrait de mon casier judiciaire. Le problème, c’est que j’ai été lourdement condamné à deux reprises pour conduite en état d’ivresse. Je suis foutu! Je connais beaucoup de patrons de restaurants qui sont dans la même situation!»

Au cas par cas

Pour Pierre Maudet, magistrat en charge de la sécurité et de l’économie, il n’y a cependant pas lieu de s’affoler: «La LRDBHD demande de s’assurer de l’honorabilité de l’exploitant et du propriétaire. Voilà pourquoi des questions sont posées sur les antécédents judiciaires.» Et de préciser: «En cas de condamnation, l’étude se fait au cas par cas par le service juridique».

Chance pour le futur

Un autre élément ressort de notre enquête, les restaurateurs dont le casier judiciaire n’est pas vierge n’en parlent pas. Pour preuve, Laurent Terlinchamp, président de la Société des Cafetiers, restaurateurs et hôteliers de Genève, n’a pas eu d’échos sur des cas particuliers qui auraient engendré un refus d’exploitation: «Depuis des années, il existe un fantasme négatif autour de notre profession. La LRDBHD met fin à la concurrence déloyale et permet de vérifier l’honorabilité de l’ensemble de la profession. Je ne connais pas d’autres secteurs de l’économie ayant fait un tel ménage dans leurs rangs. Les perspectives de cette loi restent une chance pour le futur.»

Sanctions repoussées

Une position partagée par Helena Rigotti, vice-présidente du Groupement Professionnel des Restaurateurs et Hôteliers: «Cette loi a le mérite d’avoir clarifié des situations ubuesques et d’avoir remis la plupart des exploitations sur un pied relativement égal. Quant aux sanctions éventuelles, nous pensons qu’elles tomberont à partir du deuxième ou troisième trimestre de cette année.» Une réponse qui ne réjouit guère Antoine, le restaurateur des Eaux-Vives: «Cette attente m’est tout simplement insupportable. Si on m’enlève mon restaurant, il ne me restera plus grand-chose. Tout ça pour deux égarements?»

*nom d’emprunt connu de la rédaction

Principaux changements de la loi

Quels sont les apports les plus significatifs de cette nouvelle loi? Elle modifie essentiellement deux aspects: une amplitude horaire plus importante pour l’ouverture des établissements et un contrôle plus strict des exploitants. Spécialement à l’encontre des prête-noms qui seront dorénavant plus sévèrement sanctionnés. La vente d’alcool à emporter est davantage encadrée, tout comme les fameux Happy Hours avec l’interdiction de vendre des boissons alcooliques distillées.