«On ne peut pas juste décider de mettre quelqu’un sur la touche»

Evincée de la présidence du Conseil d’administration de l’Aéroport international de Genève (AIG) jeudi 3 mars, Corine Moinat entend se battre contre cette décision du Conseil d’Etat.

  • Corine Moinat entend se battre contre la décision du Conseil d'Etat. MARIE PRIEUR

«C’est une décision que je n’accepte pas, car je n’ai pas commis de faute.» Se tenant face à un petit panel de journalistes en ce jeudi 10 mars au matin, Corine Moinat ne mâche pas ses mots. Elle livre sa version et confirme faire recours contre l’arrêté du Conseil d’Etat du 2 mars. Il y a une semaine, elle a en effet été débarquée de la présidence du Conseil d’administration de Genève Aéroport après sept ans à ce poste et à un an et demi de la fin de son mandat. Son mail étant, pour la petite histoire, coupé dès le vendredi 4 mars…

Une décision soudaine et surprenante qui s’explique selon le conseiller d’Etat chargé des Infrastructures, Serge Dal Busco par une «rupture du lien de confiance». Lors du point presse du Conseil d’Etat, mercredi 9 mars, le magistrat PDC a déclaré que Corine Moinat n’avait pas commis de «faute grave», que «la décision n’avait rien de politique» et a laissé transparaître son agacement face aux questions des journalistes l’interrogeant notamment sur le signal donné aux autres présidents de conseils d’administration de régies publiques. Au même moment, le Conseil d’administration de l’Aéroport, présidé désormais par Pierre Bernheim, renouvelait son «entière confiance» à Corine Moinat, dans un communiqué de presse.

Forte de ce soutien et de dizaines, voire de centaines de messages, notamment des autres présidents de conseils d’administration de régies publiques, Corine Moinat assure qu’elle ne comprend toujours pas les raisons de son éviction. «Sans fausse modestie, j’ai fait une carrière exemplaire. Je suis au Conseil d’administration depuis le 1er juin 2014. Et à la présidence depuis le 1er juin 2015. J’ai vécu beaucoup de choses: le changement de directeur, de magistrat de tutelle, les affaires de corruption, la pandémie…» Soulignant avoir fait pas moins de 86 points de situation au Conseil d’administration et avec le Conseil d’Etat durant cette période, elle poursuit: «Il fallait tenir bon la barre! Et je l’ai fait.»

«La première et unique fois où il m'a adressé un reproche»

D’où son étonnement quand, le 2 février, le magistrat de tutelle, Serge Dal Busco, lui, affirme avoir eu écho de critiques, voire d’une insulte, formulées à son encontre par Corine Moinat. De quoi rompre le lien de confiance. «Durant toutes ces années, c’était la première et unique fois où il m’a adressé un reproche», précise-t-elle, encore stupéfaite. Aux yeux du ministre, la confiance est rompue et Corine Moinat doit démissionner.

Seulement voilà, elle refuse. «Je ne suis pas un capitaine qui quitte son poste en pleine tempête», lance-t-elle. «Pour moi, cette décision est incompréhensible. Il n’y a pas eu de dysfonctionnements graves. Si aujourd’hui, il suffit de démettre une présidence sans raison, vous imaginez? Quel est le message pour les présidents de Conseil d’administration des régies publiques? Que va-t-il advenir des présidents des TPG? des HUG? de l’Imad?»

Pour ce qui est de l’affaire en cours, reste désormais à savoir si l’arrêté du Conseil d’Etat est attaquable sur le plan légal. Sachant que les membres du Conseil d’administration sont «nommés» et le président «désigné» par le Conseil d’Etat. La justice, en l’espèce la chambre administrative de la Cour de justice, tranchera. Dans un premier temps déjà sur l’effet suspensif ce qui pourrait avoir l’effet, plutôt cocasse de rendre son poste de présidente à Corine Moinat.