Savoir compter

  • ©OLIVIER JAQUET

«C’est pas les chiffres qui comptent.» C’est ce qu’on nous a dit quand la grève féministe a été invraisemblablement sous-estimée par les médias et la police en 2019 à Genève. D’après eux, on était 20'000. Quand j’ai entendu ça, et sachant que le front de la manif arrivait à Bel-Air alors que la queue n’avait pas encore quitté Plainpalais, j’ai fait quelques calculs de comptoirs (le nombre de personnes qui passent à la minute multiplié par le nombre de minutes de manif, un truc simple) et je suis arrivée à 75'000. Ça faisait beaucoup mais ça semblait plus compatible avec l’expérience folle que j’avais vécue – vous étiez là, vous avez vu. Mais bon, il y avait un tel écart avec les chiffres retenus que je me suis dit, allez, 40'000, même 30'000 c’est déjà bien.

Là-dessus, Heidi News envoie des photos à l’EPFL qui travaille avec un très sérieux et très crédible algorithme, et me donne raison! On était 75'000 féministes à revendiquer l’égalité à Genève!

Pourquoi je reviens sur cette (vieille) affaire? Pour la même raison qu’Heidi a envoyé les photos à l’EPFL. Les chiffres, ça compte. Et nous aussi, les féministes, on doit apprendre à compter. Il paraît que les femmes sont vénales, pourtant elles sont pauvres, elles touchent moins de salaire, d’héritage, de retraite… C’est ce que montre toutes les études qui se penchent sur le sujet.

Mesdames, nous devons apprendre à compter. On nous a appris à faire les choses avec le cœur et à donner (notre temps et notre travail notamment, lui aussi largement sous-évalué) parce que quand on aime, on ne compte pas. Je dis au contraire: les bons comptes font les bons amis. Si on a écorné notre grève de plus de deux tiers, on n’a pas écorné nos revendications: un franc est un franc et l’égalité c’est maintenant!

Rendez-vous le 14 juin 2023. Bisous.