Faut-il parler à mes enfants de ce que j'ai subi?

Francesca, enceinte de 5 mois, je suis très triste car lorsque j’étais enfant, mon grand-père m’a fait subir des agressions sexuelles. Je me demande si plus tard j’en parlerai à mon enfant. Mon mari dit qu’il faut oublier tout cela.

Museler ou faire taire une victime est le meilleur moyen de la faire aller mal. Je ne pense pas que votre mari vous souhaite d’être triste ou de souffrir en silence. Je crois qu’il réagit comme un humain qui a peur, qui comprend mal les conséquences d’un traumatisme et de son silence. Il réagit déjà en tant que père et veut protéger son enfant. Mais ce n’est pas en taisant les choses que l’on protège, au contraire. Un jour, peut-être plusieurs jours, une personne en qui vous aviez confiance vous a trahie et violentée. Votre grand-père vous a fait croire qu’il savait mieux que vous ce que vous vouliez, ou plutôt ce qu’il voulait. Je ne l’écrirai jamais assez, il n’avait pas le droit. A présent, il est temps que votre intérêt passe en premier. Ecoutez-vous. Faites-vous accompagner par le personnel médical qui suit votre grossesse. Ce sera déjà un bon début. Vous m’avez écrit que vous vous documentez beaucoup sur la maternité et les survivantes d’inceste. Dire ou ne pas dire à son enfant que l’on a été victime? A quel âge et comment en parler? Vous avez dû vous perdre dans vos lectures. Nourrissez-vous-en, laissez mûrir et accordez-vous le droit de changer d’avis. Les choses viendront avec le temps et le moment voulu. Je crois que pour l’instant vous avez besoin d’être écoutée, par des spécialistes formés et en particulier par votre mari. Monsieur, permettez à votre femme de parler de ses peurs et de ses émotions. Ce sera bon pour elle, pour vous et le bébé qu’elle porte.