Peine capitale

  • DR

Flinguer Pierre Maudet, en son absence. C’est la petite musique, plusieurs fois recommencée, du Conseil d’Etat. Oh, il faut les voir, présidente en tête, avec leurs airs d’extrême gravité. Ils arrivent, une délégation, en général trois magistrats, et puis aussi la chancelière. Ils arrivent, et c’est juste si un huissier ne hurle pas «Messieurs, la Cour!». Oui, c’est juste si les quatre exécuteurs ne se parent pas de la robe d’hermine, avec le petit marteau d’usage, celui qui envoie vers d’autres cieux le condamné. Peine capitale, bien sûr, d’avance écrite. Juste l’énoncer, dans la jouissance de la morale, quand elle se confond avec le pouvoir.

Ils arrivent, et nous jouent toujours la même scène. Il y a l’acte d’accusation, le procureur, les juges. Un seul absent: l’accusé. On parle de lui, derrière son dos. On parle d’un collègue, un pair, le mieux élu à la dernière élection générale! On arbore des airs de chef des ressources humaines, front plissé, sourcils froncés, le poids du monde. On nous dit que l’heure est grave. On nous joue à peu près le jeu des premiers accusateurs du capitaine Dreyfus, fin 1894, quand on a commencé à dire aux gens qu’un acte «d’une extrême gravité» venait d’être commis par un capitaine de l’armée française. «Nous ne pouvons pas vous en dire plus, mais c’est du lourd.»

Face à cette chorégraphie de la gravité, un acteur majeur ne s’est pas encore exprimé. Il le fera le 28 mars. Il aura le dernier mot. Il s’appelle le peuple genevois. On se réjouit de l’entendre.