La politique appartient aux citoyens!

DEMOCRATIE DIRECTE • Les Suisses sont-ils bien conscients du privilège exceptionnel que constitue leur système politique? Grâce à lui, notamment l’initiative, ils ne sont plus des sujets de la politique. Mais des acteurs.

  • Résultats d’élections à Uni Mail. La politique est l’affaire de toutes et tous. FRANCIS HALLER

    Résultats d’élections à Uni Mail. La politique est l’affaire de toutes et tous. FRANCIS HALLER

La plupart des pays, autour de nous, à commencer par la France, ne se rendent aux urnes que pour élire des gens. Au niveau national, ils envoient des députés siéger, plusieurs fois par an (on appelle cela des sessions), dans la capitale de leur pays: Paris, Rome, Berlin. Ils ont aussi des échelons régionaux, et bien sûr municipaux. Les pays membres de l’Union européenne élisent des députés européens, ce sera le cas en mai 2019.

Démocratie représentative

Elire, toujours élire. On appelle, cela, depuis la Révolution française (à vrai dire, un peu avant, déjà, en Angleterre) la démocratie représentative. L’idée est que la masse des citoyens ne peut pas se prononcer sur tout, il faut donc déléguer. En Suisse, au niveau national, nous déléguons à 200 conseillers nationaux et 46 conseillers aux Etats (deux par canton) la mission de faire des lois. Au niveau cantonal, à Genève, nous déléguons cette tâche à 100 députés. Au niveau communal, pour prendre la Ville de Genève, nous déléguons à 80 conseillers municipaux le soin de siéger au délibératif. Dans les communes et les cantons, nous élisons directement les exécutifs (mairies, Conseils d’Etat). Quant au Conseil fédéral, l’exécutif de notre pays, il est élu par les deux Chambres fédérales réunies, on appelle cela l’Assemblée fédérale (246 personnes).

Initiatives et référendums

Mais en Suisse, nous avons une chance exceptionnelle, que nos voisins nous envient: nous pouvons voter, non seulement pour élire des gens, mais aussi directement sur des thèmes. Soit en contestant une loi parlementaire, cela s’appelle le référendum (municipal, cantonal, fédéral). Soit, beaucoup plus intéressant, beaucoup plus créatif, en lançant des initiatives. Nos initiatives populaires fédérales, depuis 1891, constituent véritablement la valeur ajoutée de notre démocratie suisse. Elles ne doivent rien aux parlementaires, ni aux exécutifs, ni à un quelconque corps constitué: n’importe quel citoyen, ou groupe de citoyens, peut en lancer une. Ils doivent récolter les signatures, pas si simple! Puis, ils lancent sur l’ensemble du pays un vaste débat national, auquel tout le monde peut participer. Tout cela, venu d’en bas!

C’est un privilège extraordinaire de pouvoir bénéficier de ce système. Souvent, le comité d’initiative, quelques hommes et femmes au début, a senti, par l’instinct, qu’il fallait exhumer un sujet que les autorités auraient tant voulu laisser dormir six pieds sous terre. Et souvent, ça marche! La sauce prend. Des centaines de milliers de citoyens suisses se passionnent pour un thème. Ils se l’approprient. Ils en font leur chose. Dans les bistrots, les familles, entre amis, on s’engueule. Un beau dimanche, le peuple et les cantons (il faut la double majorité) tranchent. Et toujours, il faut être beau joueur, accepter le résultat.

Démocratie vivante

La démocratie vivante, c’est cela. Les parlementaires sont là pour faire des lois, c’est leur mission. Mais la politique n’appartient en aucun cas aux seuls élus: elle est l’affaire de toutes les citoyennes, tous les citoyens de notre pays. Vive notre démocratie directe, elle est notre bijou, notre fleuron!